* Il en a été des discussions sur le droit naturel, comme des disputes philosophiques sur la liberté, sur le juste & l'injuste : on a voulu concevoir comme des êtres absolus ces attributs relatifs, dont on ne peut avoir d'idée complette & exacte qu'en les réunissant aux corelatifs dont ils dépendent nécessairement, & sans lesquels ce ne sont que des abstractions idéales & nulles.

(1) Voyez-en l'exemple, page 9.

(2) C'est la définition de Justinien : elle a, comme les autres, son aspect où elle est vraie.

(3) Voyez-en l'exemple, p. 15 & dans la note de la p. 31.

(4) Voyez-en l'exemple dans la note de la page 14.

(5) Voyez-en l'exemple, pag. 24 & 25. Avec un plus d'étendue cette proposition serait la nôtre.

(6) C'est le système de Hobbes renouvelé de nos jours. Voyez-le présenté & réfuté p. 11, 12 & 13.

(7) Voyez-en l'exemple, pag. 2 & 27.

(8) C'est le cas d'un homme seul dans une isle déserte, dont le droit naturel aux productions de son isle n'admet ni juste, ni injuste, attendu que la justice ou l'injustice sont des attributs relatifs, qui ne peuvent exister lorsqu'il n'y a personne sur qui les exercer. Voyez le commencement du quatrième paragraphe.

(9) Voyez pages 8 & 9 & page 23.

* C'est ici le cas du proverbe qui peut s'adresser à tous dans l'état de pure nature, si tu en as besoin vas-en chercher, personne ne s'y oppose : les bêtes d'une même espece qui sont dans le même cas, ne cherchent point à se faire la guerre pour s'empêcher réciproquement de se procurer leur nourriture par leurs recherches.

* Que signifient ces mots plus libre ? Signifient-ils plus arbitraire c'est-à-dire plus indépendant des motifs qui agissent sur la volonté ? Non, car cette indépendance, si elle étoit entiere, réduiroit la volonté à l'état d'indifférence ; & dans cet etat la liberté seroit nulle : ce n'est donc pas dans ce sens que l'on peut dire plus libre. Ces mots peuvent encore moins se rapporter à l'état de volonté subjuguée par des motifs invincibles. Ces deux extrêmes sont les termes qui limitent l'étendue de l'usage naturel de la liberté.

La liberté est une faculté relative à des motifs excitans & surmontables, qui se contrebalancent & s'entre affoiblissent les uns les autres, & qui présentent des intérêts & des attraits opposés, que la raison plus ou moins éclairée, & plus ou moins préoccupée examine & apprécie. Cet état de délibération consiste dans plusieurs actes de l'exercice de la liberté, plus ou moins soutenus par l'attention de l'esprit. Mais pour avoir une idée encore plus exacte de la liberté, il ne faut pas confondre son état de délibération avec l'acte décisif de la volonté, qui est un acte simple, définitif, plus ou moins précipité, qui fait cesser tout exercice de la liberté, & qui n'est point un acte de la liberté, mais seulement une détermination absolue de la volonté, plus ou moins préparée pour le choix par l'exercice de la liberté.

D'après ces observations familieres à tout homme un peu attentif à l'usage de ses pensées, on peut demander à ceux qui nient la liberté, s'ils sont bien assurés de n'avoir jamais délibéré ? S'ils avouoient qu'ils ont délibéré, on leur demanderoit pourquoi ils ont délibéré ? Et s'ils avouent que c'étoit pour choisir, ils reconnoitront l'exercice d'une faculté intellectuelle entre les motifs & la décision. Alors on sera d'accord de part & d'autre sur la réalité de cette faculté ; & il deviendra inutile de disputer sur le nom.

Mais ne réunissons pas sous ce nom des conditions contradictoires, telles que la condition de pouvoir également acquiescer à tous les motifs actuels ; & la condition de pouvoir également n'acquiescer à aucun ; conditions qui excluent toute raison de préférence, de choix & de décision. Car alors tout exercice, tout usage, en un mot, toutes les propriétés essentielles de la faculté même, qu'on appelleroit liberté, seroient détruites ; ce nom ne signifieroit qu'une abstraction inconcevable, comme celle du bâton sans deux bouts. Dépouiller la volonté de l'homme de toutes causes déterminantes pour le rendre libre, c'est annuler la volonté, car tout acte de la volonté est de vouloir quelque chose ; c'est anéantir la liberté même, ou la faculté intellectuelle qui examine & apprécie les objets relatifs aux affections de la volonté. . . . . . .

Ne nous arrêtons pas davantage à cette absurdité, & concluons en observant qu'il n'y a que l'homme sage qui s'occupe à perfectionner sa liberté ; les autres croyent toujours être assez libres quand ils satisfont leurs désirs ; ainsi ils ne sont attentifs qu'à se procurer le pouvoir qui multiplie les choix qui peuvent étendre l'usage de leur liberté. Celui qui n'a qu'un mets pour son repas, n'a que le choix de le laisser ou de le manger, & celui d'en manger plus ou moins ; mais celui qui a vingt mets, a l'avantage de pouvoir étendre l'exercice de sa liberté sur tous ces mets, de choisir ceux qu'il trouvera les meilleurs, & de manger plus ou moins de ceux qu'il aura choisis. C'est en ce sens que l'homme brute n'est occupé qu'à étendre toujours sa liberté & à satisfaire ses passions avec aussi peu de discernement que de modération ; ce qui a forcé les hommes qui vivent en société, à établir des loix pénales pour réprimer l'usage effrené de leur liberté.

* Un homme, qui est fou par l'effet d'une mauvaise constitution de son cerveau, est entraîné par une loi physique qui ne lui permet pas de faire le meilleur choix, ou de se conduire avec sagesse.

* L'ordre naturel le plus avantageux aux hommes, n'est peut-être pas le plus avantageux aux autres animaux ; mais dans le droit illimité l'homme a celui de faire sa part la meilleure possible. Cette supériorité appartient à son intelligence ; elle est de droit naturel, puisque l'homme la tient de l'Auteur de la nature, qui l'a décidé ainsi par les loix qu'il a instituées dans l'ordre de la formation de l'Univers.