[Pommereul], Des Chemins,... 1781

Avertissement

D E S

C H E M I N S ,

ET des Moyens les moins onéreux au Peuple & à l’Etat de les construire & de les entretenir.


C’EST rappeler les Académies au plus digne objet de leur institution, que de consacrer leur [sic] travaux à l’utilité publique. Aux droits que ces savantes Sociétés s’étoient déjà faits à notre Admiration, elles vont joindre les titres non moins flatteurs, qu’elles acquièrent à notre reconnoissance.

Peu de questions d’économie politique ont été plus souvent & plus diversement agitées que celle dont j’entreprends de faire l’examen devant les Juges éclairés qui l’ont proposée. Ils ont senti combien il importoit à la patrie que les opinions flottantes, sur un objet si intéressant pour tous les citoyens, fussent enfin fixées d’une manière irrévocable. Ils ont voulu sur-tout être utiles au peuple, car le servir, c’est servir l’Etat. Dirigé par le sentiment vertueux, qui les animoit, je tâcherai de me rendre digne de sa cause que j’embrasse & du Tribunal qui doit décider ce grand problême.

Des Loix nouvelles publiées avec tout l’appareil de la puissance & de la majesté Royale, ayant détruit les anciens Réglemens suivis jusqu’alors pour la confection des Chemins, & bientôt après ces Loix nouvelles ayant été non abrogées, mais suspendues ; quand l’Académie propose de déterminer LES MOYENS LES MOINS ONÉREUX AU PEUPLE ET A L’ÉTAT DE CONSTRUIRE ET D’ENTRETENIR LES GRANDS CHEMINS, elle avoue, au moins, {A} [8] tacitement l’insuffisance de toutes ces Loix & les défauts de tous les systêmes enfantés pour les suppléer, mais elle nous paroît imposer en même temps, à celui qui voudra remplir le but de son programme, l’obligation d’analyser ces loix & ces projets. On peut donc, en se livrant à cet examen, excéder sans danger les bornes que l’Académie eût fixées à un discours oratoire, & ne pas craindre qu’une Société occupée du bien public, puisse regretter les momens qu’elle destine aux recherches qui n’ont que ce bien pour objet.

Être méthodique & clair, voilà la regle que je m’efforcerai de suivre. Dans un sujet d’administration qui a donné naissance à tant de systêmes & de débats, on doit non-seulement ne pas exiger les ornemens recherchés de l’éloquence, que le goût reprouveroit au moins comme superflus, mais encore pardonner les calculs un peu secs & les détails peu agréables & cependant nécessaires, dans lesquels je serai forcé de descendre.

La question que je vais traiter tient par un si grand nombre de rapports aux matieres les plus délicates de la politique & du gouvernement, qu’à moins d’être un adulateur servile, il est impossible de ne pas désapprouver quelquefois ses institutions. Le Défenseur de l’humanité ne doit point critiquer avec amertume des loix, des usages qu’une administration bienfaisante semble disposée à abroger, dès qu’on l’éclairera sur leurs abus. Mais loin de lui, la honteuse circonspection de ne pas dévoiler ces abus ! Loin de lui, la bassesse de ne pas les censurer ! Egalement éloigné des deux écueils de la satyre & de la pusillanimité, essayons de passer entr’eux sans les toucher.

Tous les peuples, qui ont paru avec quelque éclat sur la scene mobile du monde, nous ont laissé des monumens de leur industrie plus durables que leurs empires. Les Chemins publics qu’ils construisirent & qui durent encore, nous annoncent assez l’attention qu’ils donnèrent à cette branche de leur administration intérieure. La Grece en confia le soin aux [9] corps les plus importans, ou à ses citoyens les plus distingués. Elle fit à Rome la fortune & la gloire de ses premiers citoyens & de ses meilleurs Princes. Les Chemins ont acquis une célébrité durable & méritée aux noms d’APPIUS, d’AURELIUS, de FLAMINIUS, à ceux de CÉSAR, d’AUGUSTE, de TRAJAN. Cependant, en Italie comme en Grece, leur construction demandoit moins de dépenses qu’elle n’en exige dans nos climats : ils n’avoient besoin que d’un entretien très-médiocre & peut-être nul, parce que la qualité des matériaux dont ils étoient formés étoit supérieure à celle dont nous faisons usage, & que la chaleur de ces régions les préservoit de la cause immédiate de leur destruction, de l’humidité, de sa fréquence, de sa durée, de l’alternative du froid & du chaud, du sec & de l’humide qui tient les corps dans un état voisin de la dissolution ; qu’enfin les Chemins n’avoient pas comme les nôtres des fardeaux de 10 ou 12 milliers à supporter. Sans compter les Chemins faits par les Romains dans l’Italie, dans les Gaules, dans la Germanie, ils avoient achevé pour communiquer, avec les autres parties de leur vaste Empire, 10797 lieues. Mais tous ces Chemins, n’étoient pas faits comme on l’a cru par leurs Légions. Vespasien payoit de ses propres deniers la réparation de ceux d’Italie, tandis que les peuples, conquis étoient forcés de faire les autres par corvée.

S’il en faut croire les Historiens espagnols plutôt que M. Paw leur contradicteur, les Péruviens avoient surpassé la magnificence & l’industrie des Romains. Privés de l’usage du fer, on trouva chez ces peuples un Chemin de 500 lieues de long, bien nivelé, soutenu par des murs d’appui, bordé de parapets & accompagné de deux rangs d’arbres plantés de chaque côté, entre lesquels on avoit dirigé le cours des ruisseaux. Il faut l’avouer ; aucun peuple ancien ni moderne n’a laissé un monument public de cette grandeur & de cette utilité.

La décadence de l’Empire Romain en Europe, amena celle des Chemins. Les Barbares ne savoient [10] qu’envahir & détruire. Le seul Charlemagne, supérieur à son siecle fit rétablir en France par ses troupes & par ses sujets les chemins des Romains. Avant lui, la Reine Brunehaut avoit fait réparer cette longue voie, qui dans quelque lieux porte encore son nom. Philippe-Auguste & quelques-uns de ses Successeurs s’occupèrent un moment des Chemins : le grand, le bon Henri IV & le vertueux Sully eurent à peine le temps de former des projets, le Cardinal de Richelieu sentit leur nécessité, Colbert la fit connoître à Louis XIV qui commença nos premieres grandes Routes : Louis XV, enfin, embrassant un plan plus vaste, voulut que toutes les parties de son Empire communiquassent entr’elles avec facilité, & ouvrit & perfectionna seul plus de chemins que tous ses Prédécesseurs ensemble. Il ne reste guères aux héritiers de son trône que le tiers de l’ouvrage fait par ce Roi, pour voir totalement achevée l’immense entreprise de la confection de toutes les Routes de la France.

Douter de l’utilité des Chemins, ce seroit sans doute pousser le pyrrhonisme beaucoup plus loin qu’il ne doit aller. Des Gens systématiques & dont les idées ont eu long-temps une grande vogue, qui conservent encore nombre de partisans, ayant débité cet étrange paradoxe ; nous nous bornerons, pour toute réponse, à leur faire voir que des Chemins solides & bien entretenus sont plus utiles à l’Etat, lui procurent de plus grandes richesses, une plus grande sureté, des moyens de civilisations [sic] plus prompts que des Chemins mauvais ou mal entretenus. Prouver les avantages des premiers, sur les seconds, c’est démontrer sans replique l’utilité des Chemins : ceux qui pourroient encore la regarder comme problématique, seront peut-être convaincus de leur erreur lorsqu’ils auront vu les avantages immenses qui résultent pour un Etat de la facilité qu’ont toutes ses parties de se communiquer entr’elles.

Si l’on pouvoit supposer un pays qui manquât absolument de Chemins, il est clair qu’il faudroit [11] y consommer les denrées dans le lieu même naissance, & qu’il y auroit impossibilité de faire aucun échange de leur superflu. Si ce superflu devenoit inutile, on ne semeroit que ce qu’il faudroit pour que la terre rendit uniquement ce qui seroit nécessaire à la subsistance de chaque individu. Un tel pays n’auroit ni villes, ni arts, ni manufactures, ni commerce, ni civilisation : mais que des chevaux puissent seulement être chargés de denrées & conduits à un lieu d’assemblée commune, alors se rassembleront dans ce lieu des individus, qui, sans cultiver la terre s’adonneront aux arts, & les productions de ces arts, seront données aux cultivateurs en échange des denrées qu’ils feront naître & dont les artisans devront subsister. Les colons augmenteront donc leur culture, & l’augmenteront sans craindre de voir perdre les fruits de leurs récoltes. Supposons que des Chemins soient ouverts entre toutes les villes déjà formées & les campagnes qui les font vivre, que les voitures soient inventées, alors la facilité de transporter de plus grandes quantités de bled à moindre frais, fournira aux habitans des villes des denrées à plus bas prix, leur population augmentera avec la plus grande facilité de subsister ; la population augmentant, assure le débit des denrées & amene nécessairement leur plus grande réproduction. Si des Provinces peuvent ensuite communiquer entr’elles, aucune ne craindra de se voir surchargée de récoltes inutiles, quand celle qui en aura d’abondantes pourra les verser dans les marchés du pays qui auroit eu le malheur d’en avoir d’insuffisantes. Supposons maintenant que notre peuplade puisse communiquer par des Chemins, des Rivieres, des Canaux, ou des Ports avec les nations étrangères, & qu’une d’elles manque des denrées nécessaires à ses besoins quelconques, on doit voir que nos colons & nos citadins pouvant lui porter le superflu de leurs denrées de toute espèce, en recevront en échange, ou des choses dont ils manqueroient ou de l’argent, & qu’à ce moyen leurs inutiles denrées exportées leur au-[12]ront fourni une valeur qui augmentera la somme de leurs jouissances, ou qu’ils appliqueront à faire renaître une plus grande quantité de productions. Tous les échanges soit entre sujets, soit avec les étrangers accroissent la masse des richesses nationales en procurant des valeurs nouvelles & une plus grande réproduction ; car, il n’est point de peuple dont le commerce put ou voulut constamment donner plus, pour recevoir moins, & le but général du commerce est toujours de donner moins pour recevoir plus. Si l’on nioit la généralité de ce principe, qui me paroît vrai dans toutes ses branches, quoique susceptible d’une foule de distinctions métaphysiques, que ce n’est pas ici le lieu d’analyser, on seroit toujours forcé de convenir que le bénéfice résultant des ventes faites à l’étranger, apporte dans l’Etat une richesse qui n’y étoit pas & accroît conséquemment la richesse nationale. Or, n’est-il pas évident que si, pour aller joindre nos ports & nos frontieres, les vendeurs avoient pour le transport de leurs denrées de très-gros frais à faire, les gains sur les ventes seroient moindres & conséquemment le gain total provenant du commerce ou de la totalité des échanges? Si les frais étoient tels qu’ils fissent monter les denrées à un plus haut prix que celui auquel les vendeurs en concurrence pourroient livrer les leurs, il n’y auroit point de ventes & de là point de profit, point d’augmentation à la masse des richesses nationales. Il est donc clair que si les frais de transport font grands, c’est au détriment du prix des ventes de la premiere main. Plus ces prix baissent, moins le colon peut donner de revenu au propriétaire, moins il a de moyens d’augmenter sa culture. Il est cependant pour les Etats, à la fois agricoles & manufacturiers, un maximum de prix qu’il ne faut pas que les denrées nécessaires à la vie passent, car ce qu’on gagneroit alors par la vente & l’exportation de ces denrées se perdroit par la chute des manufactures, & lorsqu’un Etat les a laissé s’établir, il a contracté l’obligation d’empêcher leurs artisans de mourir de faim. C’est ce [13] medium de prix que les mauvais Administrateurs ne savent ni saisir ni fixer.

Diminuer les frais de transport, c’est donc procurer à ses denrées un bas prix qui, dans les ventes, leur assure la préférence des Acheteurs : de la certitude de cette vente, des bénéfices qu’elle amene, naît la richesse nationale & la réproduction de ces mêmes denrées qui la donnent.

De là dérive manifestement l’extrême nécessité des Chemins, des bons Chemins & de leur multiplication : delà dérive, la nécessité plus grande des canaux & des rivieres navigables qui voiturent à bien moindres frais encore que les Chemins. Si la France n’est pas à son plus haut point de prospérité, elle doit y arriver promptement dès qu’elle aura ouvert ces communications intérieures, dont la position avantageuse de ses rivieres rend l’exécution si facile. Heureuse, si elle a la sagesse de ne pas laisser absorber, par les péages & les douanes, les bénéfices immenses que doit nécessairement lui procurer une semblable navigation.

Si tout ce que nous venons de dire ne portoit pas une pleine conviction dans les esprits, si l’on doutoit encore de l’avantage qui naît pour l’Etat de la multiplication des Chemins, quelques détails qu’on voudra bien nous pardonner, jetteront sur notre sentiment le jour de l’évidence.

Les bénéfices que procurent de bons Chemins résultent de la plus grande facilité du charroi, qui favorisant l’exploitation de toutes les especes de biens, augmentent la culture, la réproduction & la richesse nationale.

Supposons, avec le Maréchal de Vauban, que la France contienne par lieue quarrée 300 arpens de vigne, 600 arpens de bois, 2700 de terre labourable, & employons le reste en prairies, jardins, maisons, chemins, terres incultes, &c. Une voiture roulant sur un mauvais chemin, ne peut porter à attelage égal que le tiers de la charge qu’elle porteroit sur un bon chemin, & doit marcher un tiers moins vite. Or, une voiture semblable roulant sur [14] un bon chemin avec un attelage égal, portera donc deux fois plus, & fera donc dans le même temps un tiers plus de chemin : ainsi, les quantités semblables de denrées voiturées par des attelages égaux dans un temps égal sur un bon ou sur un mauvais chemin, sont entr’elles dans le rapport de 2 à 9. Ce rapport sera donc la mesure des transports que nous allons comparer.

L’arpent de vigne produit, année moyenne, six demi-queues : si le pays en consomme deux, il en reste quatre à transporter : supposons qu’elles n’aient que trois lieues à faire pour arriver au lieu de leur vente ou de leur consommation ; une voiture attelée de trois chevaux payée 4 liv. 10 sous, voiturera les six demi-queues dans un jour, y compris le retour : les frais de transport seront donc de 15 sous par demi-queue : mais si les six demi-queues doivent voyager par de mauvais chemins, le rapport du prix des transports étant de 2 à 9, elles coûteront 20 livres 5 sous & chaque demi-queue 3 livres 7 sous 6 deniers. Le bénéfice résultant du transport sur le bon chemin, sera de 2 liv. 18 sous 6 den. par demi-queue. L’arpent en produisant quatre à exporter, gagnera sur les frais de transport 10 livres 10 sous ; les 300 arpens de vigne de chaque lieue quarrée, seront donc un bénéfice de 3150 livres, négligeons ces 150 livres, & ne comptons que sur 3000 liv.

Les bois sont ou taillis ou futaies : nous n’apprécierons point le produit trop variable de ces derniers ; en les supposant tous taillis, on sent que nous diminuons les avantages de notre cause. L’arpent de taillis près des bons chemins, produit, année moyenne, 10 livres ; s’il en est loin, il ne rend que 2 liv. ; la proximité des bons chemins augmente donc leur produit de 8 livres; réduisons ce gain à moitié, les 600 arpens de bois augmenteront donc d’une valeur annuelle de 2400 livres.

Des 2700 arpens de terres labourables, admettons-en un tiers en jacheres, un tiers en froment, un tiers en menus grains : il faut deux tiers de [15] septier pour ensemencer un arpent en froment, & l’arpent rapporte, semence déduite, & qualité de terre moyenne, trois & demi pour un : le tiers ensemencé en menus grains, peut, sans craindre d’enfler son produit, être calculé à un quart du nombre des septiers de froment produit par l’autre tiers. 900 Arpens en froment produiront, avec 900 arpens en menus grains, 2625 septiers : supposons que les habitans qui doivent vivre du produit de ces 1800 arpens consomment 1625 septiers, c’est accorder beaucoup, puisque c’est donner au moins deux septiers par habitant de chaque lieue quarrée, il en restera 1000 à exporter; le marché où ils doivent se rendre étant estimé distant de trois lieues, & les terres productrices du bled situées sur une bonne route, une voiture payée 4 liv. 10 sous, y portera en un jour 10 septiers: les frais de port du septier ne reviendront qu’à 9 sous; si le chemin étoit mauvais, ils monteroient (dans le rapport de 2 à 9 ) à 40 sous 6 den. Le bénéfice par septier, procuré par les bons Chemins, fera donc de 31 sous 6 den. & pour les 1000 septiers, de 1575, livres.

Avantages des chemins, bénéfices que les bons procurent sur les mauvais par lieue quarrée :

Pour les vignes ,

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3000

liv.

Pour les bois ,

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2400

Pour les grains ,

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1575

Bénéfice par lieue quarrée , . . . . . . 6975


Quoique nous n’ayons pas voulu faire compte des bénéfices que procureroient les bois futaies, ne négligeons pas de faire sentir combien les chemins sont nécessaires à leur culture. Pourquoi sont-ils devenus si rares en France ? Parce qu’il y avoit un gros bénéfice à faire sur leurs ventes, lorsqu’ils étoient situés près des canaux, rivieres navigables ou grandes routes, & qu’on s’est plus pressé de couper ceux qui étoient ainsi placés que de les replanter, & qu’ils ne se sont hâtés de revenir, parce qu’on perd le [sic] produit du territoire qu’ils [16] occupent lorsqu’ils sont éloignés seulement de six lieues de ces différens débouchés. Le prix moyen de la solive, bois équarri, est généralement en France de 3 livres chez le Marchand; pour qu’il y gagne, il faut qu’il ne l’achete que 40 à 50 s. si le bois à exploiter est éloigné de six lieues du Chantier du Marchand, par un bon chemin, une voiture attelée de trois chevaux, payée 4 liv. 10 s. portera seize solives, & reviendra le même jour ; l e transport de chaque solive coûtera donc 11 sous 3 deniers ; si les chemins sont mauvais, suivant le rapport ci-dessus établi, il coûtera 2 liv. 10 sous 7 den. le bénéfice par solive, causé par les bons chemins, est donc de 39 sous 4 den. les frais d’exploitation, de garde, de vente, &c. sont évalués 8 sous par solive ; l’une de ces solives coûteroit donc 19 sous 3 den. quand l’autre reviendroit à 2 liv. 18 sous 7 den. : or, quel est le Marchand qui ne devant vendre son bois que 3 liv. l’achetera 2 liv. 18 sous 7 den. : le Propriétaire des bois futaies, au delà de six lieues de communication, n’ayant, comme on voit, aucune possibilité de vendre, est réduit à ne planter que des bois de décoration, & à les destiner ou aux réparations de ses bâtimens ou à chauffage. Les pieces de bois dont l’extrême beauté ou l’extrême besoin des acheteurs haussent excessivement le prix, ne changent rien à cet apperçu, puisque même, sur ces pieces, le Vendeur perd toujours les 39 sous 4 deniers par solive, qu’un bon chemin lui eut fait gagner.

Nous n’avons exposé qu’une partie des bénéfices produits par les Chemins; que seroit-ce, si nous pouvions montrer les gains qu’ils ont valu [sic] au commerce ? On en peut juger par ces seuls traits : vers la fin du regne de Louis XIV, le cent pesant coûtoit, de Paris à Bordeaux 30 liv. de port ; en 1740 il étoit réduit à 20 liv. ; aujourd’hui il est descendu à 9 livres : vers 1740, le même quintal coûtoit de Nantes à l’Orient 40 à 50 livres, il est maintenant à 2 livres 10 sous. On comptoit, en 1683, 500,000, 000 livres d’especes en France, & [17] le Ministre qui gouverne aujourd’hui avec tant de gloire nos Finances, & qu’on peut en croire sur cette matiere, évalue notre numéraire actuel à 2,000,000,000 livres. La masse des richesses nationales malgré tous nos malheurs & toutes nos fautes a donc quadruplé dans moins d’un siecle. Auroit-on fait, auroit-on pu faire ces énormes bénéfices, si les frais d’exportation de nos denrées, en diminuant par la facilité de leurs transports, ne leur eussent assuré un bas prix qui procuroit & leur vente & les profits qu’elle amenoit ?

Nous avons prouvé que les Chemins valoient à la France, par lieue quarrée, un bénéfice annuel de 6975 livres ; or, le Royaume devant avoir 6200 lieues de routes (je m’en tiens à cette évaluation, qui en raison de sa foiblesse augmente la force de mes conclusions), verra donc accroître son revenu annuel de 43,245,000 liv & qu’on ne croie pas ce calcul enflé : pour obtenir le résultat qu’il offre, on n’a supposé qu’une demi-lieue de terrein, de chaque côté des routes, jouissant des qu’elles procurent, & certainement les biens situés à une plus grande distance y participent en raison inverse de leur éloignement. On n’a point compté les gains qui résultent de la plus grande valeur acquise par les prairies, jardins, &c. dont le superflu est vendu & versé dans les Villes: on a négligé les économies qu’elles font faire au Gouvernement dans les transports de son Artillerie, de ses bois pour la Marine, de ses fers coulés, &c. Cependant ces dépenses payées du produit des impôts le sont en effet par le peuple ; ainsi, toute économie sur cet objet tend à lui épargner une subvention nouvelle, en même-temps que ces routes assurent sa tranquillité, en ajoutant de nouvelles facilités pour la défense de l’Etat.

Pour donner une idée juste du bénéfice que procurent les Chemins, ce n’est pas assez d’avoir présenté leurs avantages, il faut aussi montrer les pertes qu’ils occasionnent. De la comparaison de ces deux tableaux naîtra l’opinion qu’il en faut prendre. {B} [18] Toutes les routes faites ou à faire en France étant évaluées à 6200 lieues, les unes ayant de largeur 72 pieds, les autres 48, & Plusieurs 36 ; leur largeur moyenne peut se fixer à 60 pieds ou 10 toises ; ainsi, elles contiennent & enlevent à la culture 127,335 arpens & demi.

Mais on ne peut pas regarder comme perdue la totalité de ce terrein ; on ne doit sans doute regarder comme telle, rigoureusement parlant, que l’espace employé à leur donner plus de largeur qu’elles n’en avoient autrefois, car par-tout où il existe des routes, il y en avoit depuis long-temps. Or, ces anciens Chemins, plus longs & plus sinueux que les nouveaux, réduits cependant à la même longueur que ces nouveaux, & à une largeur moyenne de 40 pieds, emportoient 84,890 arpens : le terrein perdu par l’élargissement des nouveaux, n’est donc que de 42,445 arpens, qui, évalués à un produit moyen de 10 livres, diminuent le revenu de l’Etat de 424,450 livres, lesquelles reparties sur 6200 lieues de route, font par lieue une diminution de produit de 68 livres. 1re. hypothese.

Veut-on accorder que la moitié des anciens Chemins a été rendue à la culture? Alors on ne perdra en tout que 84,890 arpens, qui, aux mêmes évaluations & répartitions que ci-dessus, donneront par lieue une perte annuelle de 1,6 livres. 2e. hypothese.

Veut-on considérer les anciens chemins comme totalement perdus pour la culture? Veut-on croire que les nouveaux n’ont jamais été tracés sur le terrein qu’ils occupoient ? Eh ! bien, soit : la perte qu’ils occasionnent est d’abord pour leur surface propre, de 84,890 arpens, & pour l’excédent de largeur de ceux qu’on leur substitue, 42,445. -- Total, 127,335 arpens, qui évalués à 10 liv. de produit, sont une perte annuelle de 1,273,350 liv. lesquelles réparties sur 6200 lieues, ne donnent par lieue qu’une perte annuelle de 205 livres. 3e. Hypothese.

Or, nous avons vu précédemment qu’en affoi-[19]blissant tous les rapports, un bon Chemin procuroit au-dessus d’un mauvais un bénéfice annuel de 6975 livres par lieue quarrée : si nous en déduisons les pertes qu’il occasionne, ce bénéfice sera réduit,

suivant

la 1re.

hypothese,

à 6907 l.

la 2e.

. . . . . . . . . . . .

à 6839

par lieu quar.

la 3e.

. . . . . . . . . . . .

à 6770

La France ayant 6200 lieues de routes en bon état, acquérera donc annuellement, même suivant la plus désavantageuse de ces hypotheses, un bénéfice de 41,974,000 livres.

Me reprochera-t-on de négliger un des élémens de ce problême, en ne tenant pas compte du prix que coûtera la façon de ces Chemins, prix qu’il faut déduire de la somme que je présente, comme un bénéfice net & un accroissement annuel de revenu? Je répondrois que l’estimation du prix d’une lieue de Chemin faite par corvée est peut-être impossible à déterminer, qu’ainsi, je ne m’attacherai point à faire à cet égard des suppositions sur lesquelles on pourroit disputer ; mais on fait, à n’en pouvoir douter, que le prix moyen de cette même lieue, faite à prix d’argent, est dans le Royaume en général de 80,000 liv. : nos 6200 lieues coûteroient donc 496,000,000 liv.: or, le revenu qu’elles rendent représente un capital de 839,480,00 liv. Ainsi, placer son argent à la construction d’un Chemin, est donc bien évidemment pour l’Etat & pour les particuliers, le placer à un intérêt de 10 pour cent ; ainsi, indépendamment de l’intérêt de sa mise, l’Etat retireroit de ses Chemins un bénéfice net de 17,174,000 livres.

Remarquons encore, qu’à peine un nouveau Chemin s’ouvre, qu’il fait naître des défrichemens, & des améliorations de tout genre; vérité de fait, dont peut se convaincre tout homme qui voudra parcourir la France & ne pas toujours dormir dans sa chaise de poste. La perte du territoire occasionnée par l’ouverture de nouvelles routes ou l’élargissement d’anciennes, est à mon avis, tellement rachetée par l’augmentation de culture & de pro-{B 2}[20]ductions qui en dérivent, que je ne puis douter un moment qu’il n’y eut 20 pour cent de bénéfice à faire, par l’ouverture d’un Chemin dans un territoire cultivable & privé de cet utile débouché auquel il devroit bientôt sa vivification.

Ce n’est pas assez d’avoir prouvé l’utilité des Chemins, il faut encore répondre aux objections qui se sont élevées contre ceux de la France. On leur a reproché,
1°. D’être trop larges.
2°. D’être peu solides.
3°. D’être tracés suivant des lignes trop droites.
4°. De causer de grands dommages aux Propriétaires & à la culture.

Voici nos réponses à ces quatre objections.

1°. Toute grande route est composée de trois parties égales : les deux bermes* & la chaussée. Dans celles qui sont très fréquentées, chacune de ces parties doit être telle que deux files de voitures & un Cavalier y puissent passer. La voie des voitures est de 8 pieds ; celle du Cavalier de 4 ; ainsi, les grandes routes très-fréquentées auroient besoin d’être larges de 60 pieds, non compris leurs fossés. On donnoit aux routes ordinaires 16 pieds de largeur dans chacune de leurs parties, c’est-à-dire, au total, non compris les fossés, 48 pieds : les Chemins royaux en avoient 36.

Cette division des Chemins, en trois parties égales, est fondée sur ce que lors des réparation on charge de matériaux l’une des bermes, qui devenant ainsi que la chaussée qu’on racommode, interceptée, nécessite l’existence de la seconde berme qui reste libre ; & sur ce qu’en donnant à chacune de ces parties un peu plus de largeur qu’il n’en faudroit à la rigueur, il en résulte une grande économie sur l’entretien, parce que les voitures ne suivant pas toujours la même trace, fatiguent moins & détruisent moins vîte les Chemins. Si ces raisons ne font pas excuser la largeur des Chemins, au moins ce reproche ne pourra-t-il plus leur être fait légitimement. Depuis l’Arrêt du Conseil du Roi [21] du 6 Février 1776, les routes sont en vertu de cette Loi divisées en quatre classes : celles qui traversant la totalité du Royaume menent de la Capitale aux principales villes & Ports, forment la premiere, & ont de largeur 42 pieds, & dans les bois 60 : celles qui communiquent entre les grandes villes des différentes Provinces forment la deuxieme, & ont 30 pieds : celles qui communiquent entre les principales Villes d’une même Province ou des Provinces voisines forment la troisieme, & ont 30 pieds: celles enfin qui servent aux petites villes & Bourgs à communiquer ensemble, forment la quatrieme & ont 24 pieds. Toutes ces largeurs sont celles du chemin, non compris les fossés ni l’empatement des talus de leurs glacis. On ne croit pas que la fixation de ces nouvelles mesures puisse mériter le reproche de trop d’extension.

2°. Nos Chemins sont peu solides : cette objection ne peut concerner nos Chemins pavés dont la solidité est à l’épreuve des plus fortes charges, & auxquels on ne peut faire que le reproche de n’être bons & praticables que dans les pays pourvus de grès, celui d’exiger un entretien fréquent & dispendieux, & l’attention la plus scrupuleuse à en écarter les grosses voitures dans les temps de dégel : elle ne regarde donc que nos chaussées en empierrement; mais lorsqu’elles font faites suivant de bons principes & avec de bons matériaux, leur solidité est prodigieuse, & cette solidité doit s’accroître journellement en raison des recharges qu’elles souffrent. Les mauvais Chemins en ce genre ne sont tels que par le défaut naturel des matériaux, par leur mauvais emploi, ou parce que la corvée nuit en beaucoup d’endroits à leur bonne construction ; par-tout où ils sont l’ouvrage d’un Entrepreneur, ils sont excellens, ou offrent la preuve d’une malversation : leur extrême solidité doit sur-tout être l’effet du temps & de leurs recharges successives ; ainsi, l’objection est au moins prématurée. Qu’on ne dise pas que les Chemins des Romains {B 3} [22] étoient plus solides, ils sont presque par-tout ce que les nôtres deviendront un jour; un massif de pierres concassées, pulvérisées, faisant corps, par l’effet des lotions successives, de la pression renouvellée & du temps. Ces voies Appienne, Aurélienne, Flaminienne, si vantées, & que les Romains avoient construites avec des soins & des dépenses effrayantes, sont en effet des Chemins impraticables & qu’on cesse d’admirer quand on a eu le malheur de les parcourir. Si les autres Chemins des Romains ont tant duré, la vraie cause en est dans le petit nombre de voitures qui les parcouroient, & dans la légéreté des poids dont elles étoient chargées: ces Chemins portoient rarement des charges de trois à quatre milliers, & les nôtres sont sans cesse parcourus par des Rouliers dont les charriots & les charges pesent ensemble jusqu’à douze & treize milliers. Quelle étonnante différence ne doit-il pas se trouver dans la durée de deux Chemins également solides, lorsqu’ils supportent des poids si inégaux? Ces motifs me font croire nos chaussées en empierrement, celles qui ont été faites avec soin, aussi bonnes, aussi durables qu’aucune de celles des Romains. Si ces anciens maîtres du monde pouvoient être transplantés sur nos routes, plus justes que nous, on les verroit admirer les Chemins pratiqués dans les montagnes de Saverne, de Juvisy, de Tarare, de Tréfou, de Pont-Chartrain, &c. Les levées de Weiss les étonneroient, & leur surprise & leur admiration nous prouveroient qu’ils ne nous ont laissé aucuns Chemins qui puisse se comparer, ni avoir servi de modele aux chefs-d’œuvres [sic] en ce genre que nous avons su créer, & que nous ne savons pas assez vanter.

3°. Les Chemins sont tracés suivant des lignes trop droites : un pareil reproche suppose de l’ignorance ou de la mauvaise foi; c’est un axiome connu des enfans, qu’entre deux points la ligne droite est le plus court Chemin. Tout Chemin aligné droit prend donc le moins de terrein possible, [23] coûte donc le moins de frais de construction & d’entretien, augmente par son raccourcissement même tous les gains qu’il doit procurer : voilà bien assez de titres pour lui valoir une préférence incontestable. Un coude fait naturellement présumer de la fraude dans le tracé du Chemin ; il épargne presque toujours, non le terrein du pauvre, mais celui du riche, qui seul posséde le secret de fausser la direction des Chemins. Si le Gouvernement veut un jour le faire redresser, une injustice premiérement commise expose l’Etat à une nouvelle perte de terrein & à de nouveaux frais de construction. Toutes les fois qu’on ouvre un Chemin nouveau, un bon citoyen doit désirer parce que cela est juste, nécessaire & profitable qu’il soit tracé en ligne droite, sans acception de personne. Les seules causes qui lui permettent de sortir de la rectitude de son alignement, sont la nécessité de le diriger vers les points les plus accessibles des montagnes, vers les principaux Villages auxquels il doit servir, & le besoin d’éviter les rencontres trop répétées de ruisseaux & de rivieres, dont la fréquence amene l’obligation d’un entretien éternel de ponts, plus, onéreux cent fois que leur premiere construction.

4°. Ils causent de trop grands dommages aux particuliers & à la culture. Nous avons d’avance réfuté victorieusement cette objection, quand nous avons prouvé & déterminé les bénéfices occasionnés par les Chemins. Si le petit territoire d’un pauvre particulier se trouve enclavé dans leur tracé, sans doute les dédommagemens qu’on lui donne ne l’indemnisent que foiblement de la perte de sa modique, mais précieuse propriété, & la patrie a tort si elle l’expose à regretter le sacrifice qu’il est forcé de lui faire. Mais un tel reproche ne sauroit concerner l’administration des Chemins, il ne s’adresse qu’au Gouvernement, qui seul peut & doit même n’en jamais mériter de semblables. Quant au riche propriétaire dont les possessions se trouvent écornées, il est prouvé en rigueur qu’indépen-{B 4}[24]damment des indemnités qu’on lui donne presque par-tout, & qui, je l’avoue, devroient être généralement exigibles de droit, il est prouvé, dis-je, qu’il est doublement dédommagé de la perte d’une portion de son territoire, par la nouvelle & plus forte valeur que la route donne au reste de sa possession : or, cette valeur ne s’accroît pas sans que la culture n’augmente & ne s’améliore. De toutes façons, l’objection combattue porte à faux.

On a prétendu que les Chemins multipliés à l’excès en France, occupoient une trop grande partie de la surface du Royaume. Suivant le systême que vouloient faire valoir les écrivains, ils exagéroient ou affoiblissoient le rapport de la superficie des Chemins à celle de la France. Les derniers calculateurs ont dit : la France contient 30,000 lieues quarrées, (la lieue de 2282 toises & demie, & la lieue quarrée de 5,208,665 un quart, toises quarrées) & a 6200 lieues de routes, dont la largeur moyenne peut s’évaluer à 10 toises. De ces données il résulteroit que la surface de la France seroit de 156,259,957,500 T. T. ; & celle de ses Chemins de 141,515,000 T. T., & que cette premiere surface seroit à la seconde dans le rapport de 1104 un cinquieme à l’unité : mais nous croyons ce rapport infidele, parce que dans le compte des routes, on n’a vraisemblablement compris que les grands Chemins royaux: en effet, la Bretagne,qui n’est gueres que la vingtieme partie de la France, a seule au moins 900 lieues de routes d’une largeur moyenne de 8 toises. Si toutes les Provinces ont des Chemins dans un rapport approchant de celui de la Bretagne, ce qui paroît assez vraisemblable, il faudroit en conclure que le Royaume contient 1800 lieues de routes, & en comptant à 8 toises leur largeur moyenne, leur surface, qui seroit de 328,680,000 toises quarrées, seroit à celle de la France comme 475 un tiers est à 1.

Au reste, rien n’est plus indifférent à connoître que ce rapport, quoique ce dernier approche peut-être beaucoup de la vérité. Qu’importe Qu’importe qu’il y ait [25] beaucoup de chemins, pourvu qu’il n’y en ait pas d’inutiles ? Avant de crier sur la perte de terrein qu’ils occasionnent, il falloit examiner s’ils étoient la cause immédiate d’une plus grande production, si en les détruisant on ne réduiroit pas cette production presque à rien, si en les diminuant de nombre, on ne la diminuoit pas en même raison. Si ces recherches avoient conduit à trouver que la production augmentoit en raison du nombre des Chemins, il auroit bien fallu conclure que plus on les multiplieroit, plus on accroîtroit la production ; que plus on accroîtroit la production, plus on auroit de consommateurs ou d’habitans qui se mettent d’ordinaire en équilibre avec la quantité des subsistances; plus on augmenteroit la masse des richesses nationales par le bas prix qu’amenent de concert l’abondance des denrées & la facilité de leurs transports, & par les bénéfices immenses que feroit, refluer dans l’état leur vente à l’étranger. On pouvoit alors ne s’inquiéter en rien du rapport de la superficie des Chemins à celle du Royaume, qui n’est, comme on le voit, qu’une question oiseuse & de pure curiosité. Si la France a déjà beaucoup gagné par les belles & nouvelles grandes routes qu’elle s’est faites, une révolution non moins avantageuse & plus rapide l’attend encore lorsqu’elle aura changé sa législation rélativement aux Chemins ruraux : ils sont presque par-tout impraticables pendant les deux tiers de l’année ; qu’ils deviennent beaux, il s’ensuivra un baissement de prix pour toutes nos denrées de premiere nécessité, qui procurera de grands bénéfices sur celles destinées à l’exportation.

Tous les moyens possibles de construire des Chemins se réduisent essentiellement à deux ; l’un par lequel des ouvriers qu’on paye font cet ouvrage, l’autre par lequel il est fait par des ouvriers qu’on ne paye pas : il résulte de l’emploi de ces deux moyens un paradoxe aussi vrai qu’étrange ; c’est que les Chemins les plus chers sont ceux faits par des ouvriers non payés.

à suivre ...

Tableaux annexes